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TRIBUNE. Pour relever les défis de la complexité des risques, le secteur des assurances africaines se devra d’adapter sa stratégie aux nouvelles technologies.

 

Traditionnellement, l’assurance est largement reconnue comme l’outil financier de référence pour dissiper, voire atténuer, les impacts négatifs des chocs inattendus. Malgré son caractère immatériel, elle contribue pourtant à stimuler la croissance et à accroître la résilience des économies locales et des ménages. Cependant, en dépit de leurs efforts, les assureurs classiques en Afrique ont du mal à pénétrer certains segments de marché, particulièrement celui des populations les plus vulnérables. En cause : les revenus insuffisants des foyers, les faibles niveaux d’éducation financière, la non-obligation d’assurance sur les risques de masse, et surtout un manque de confiance dans les compagnies d’assurances. Par conséquent, « l’auto-assurance » ou d’autres formes d’assurances informelles conçues pour transférer et gérer les risques collectivement prenant souvent la forme d’une épargne communautaire (tontines, iddirs…) restent largement plébiscitées.   L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est 21490011lpw-21490260-embed-libre-jpg_7805864.jpg.  

Selon Sigma-Swiss RE, le marché africain de l’assurance affiche une progression du volume total des primes de près de 5 % (56,5 milliards d’euros en 2018 vs 53,8 milliards d’euros en 2017) tout en ne représentant que 1,31 % des primes mondiales – alors que 13 % de la population mondiale est en Afrique. À cela, il faut également ajouter le déséquilibre étourdissant qui fait que plus de 70 % des primes africaines sont en Afrique du Sud, suivie de loin du Maroc (6 %) et du Kenya (3 %).

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Proposer au plus grand nombre une expérience client enrichie

Fort heureusement, l’innovation numérique apparaît comme un moyen de conquête de nouveaux marchés pour les activités assurantielles. La digitalisation du secteur permet la réduction du coût de service aux clients, la rationalisation des processus internes, mais surtout la mise à disposition au plus grand nombre d’une expérience client enrichie. En cela, les start-up de l’assurance pourraient ainsi contribuer, d’une part, à démocratiser les souscriptions à ces produits, à rétablir la confiance de la part des particuliers et, d’autre part, à induire de nouveaux usages pour les très petites entreprises.

Plus encore, ces offres digitales contribuent à la rénovation des systèmes historiques coûteux, encore centrés sur le principe des succursales et des réseaux de courtiers. Au cours des dernières années, de nombreux bouleversements ont ainsi marqué le marché. À l’instar des compagnies d’assurances organisées en réseau qui ont connu une croissance forte, les levées de fonds dans l’assurtech ont atteint des montants records (entre 15 et 20 millions d’euros, selon McKinsey). Parallèlement, la bancassurance s’est distinguée : si le taux continental de pénétration de l’assurance oscille sinistrement autour de 2 %, il atteint près de 10 à 20 % par l’intermédiaire des acteurs financiers.

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Le mobile, un vecteur prometteur pour la diffusion des produits d’assurances

De manière intéressante, il semble que l’avenir du réseau classique de distribution et des acteurs historiques se joue particulièrement sur le mobile. En effet, le taux de pénétration du mobile à l’horizon 2025 est estimé à 65 %, dont 50 % de la population abonnée à des services mobiles, selon GSMA. Les smartphones deviennent incontournables pour agrandir la base clients d’un assureur, mais surtout pour enrichir son offre de service. En investissant le mobile, ils étoffent leur gamme de produits et renforcent leur part de marché et image de marque – indispensable sur ce type de services. À l’instar de la start-up Pula au Kenya qui vient d’annoncer une levée de fonds de près de 5 millions d’euros avec un service d’assurances agricoles. Pula se distingue en mettant à la disposition des petits agriculteurs des produits numériques destinés à les aider à gérer les risques climatiques, à améliorer leurs pratiques agricoles et in fine à augmenter leurs revenus au fil du temps – au-delà de l’assurance, Pula devient un partenaire de confiance. En Afrique centrale et de l’Ouest, c’est la start-up Baloon qui vient de lever près de 2 millions d’euros, pour développer son service d’assurance digitale.

Ainsi, à plus long terme, il s’agira pour l’assurtech d’être en mesure de promettre une relation sécurisante avec ses prospects et ses clients. L’enjeu sera de dépasser le cadre simpliste risques vs primes pour accompagner les non-initiés à une meilleure compréhension des bienfaits de l’assurance et de leur domaine d’activité. Il faudra également envisager des stratégies ambitieuses de partenariats. L’alliance entre assurances, opérateurs mobiles et spécialistes du paiement digital se révèle être un pari prometteur pour le secteur. En effet, la collecte et le versement des primes de façon rapide et sécurisée seront un enjeu de cette prochaine décennie pour le secteur.

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